Où l’on découvre qu’il est des livres plus anciens que les livres anciens !
Écriture, texte, livre… La trilogie accompagne le cheminement de l’humanité depuis plusieurs millénaires, plongeant ses racines loin dans l’Antiquité.
La forme du livre que nous connaissons aujourd’hui remonte à Gutenberg (v. 1400-1468) et à l’invention de l’imprimerie. À peine plus de cinq siècles nous séparent de cette véritable révolution. Les exemplaires imprimés durant cette période sont qualifiés de livres anciens et modernes par les libraires, collectionneurs, bibliophiles et autres amateurs.
Auparavant, le livre avait revêtu plusieurs formes depuis ses origines, sachant qu’il se définit par les caractéristiques suivantes :
– il recueille les signes d’une écriture ;
– il permet la diffusion et la conservation d’une connaissance ou d’un état ;
– il est portatif.
Vénérables ancêtres de nos livres anciens et modernes, les tablettes de bois et d’argile, les papyrus égyptiens et les livres de soie chinois occupent une place de choix dans le panthéon des ouvrages de l’esprit.
Tablettes de bois et d’argile gravées
Au fil des âges, les ancêtres de nos livres se sont épanouis sur des supports variés : os, écaille, bronze, coquille, poterie, feuille, ardoise, peau d’animal…
« Les mots biblos en grec et liber en latin désignaient à l’origine une partie de l’écorce des arbres. »
Durant l’Antiquité, l’Europe connaît les tablettes de bois et la Chine celles de bambous. Les caractères des tout premiers livres sont gravés sur des écorces. Les mots biblos en grec et liber en latin nous le rappellent, qui désignaient à l’origine une partie de l’écorce des arbres.
En Mésopotamie, au IIIe millénaire avant notre ère, les tablettes sont en argile. L’écriture, tracée lorsqu’elles sont encore humides, se fixe après séchage. De grandes bibliothèques constituées de tablettes ont existé, comme celle de Ninive au VIIe siècle avant J.-C., où les rois d’Assyrie ont regroupé quelque 22 000 tablettes d’archives.
Papyrus égyptiens sur les bords du Nil
Ah ! Le fameux papyrus égyptien ! L’art d’écrire à la tige de roseau sur des feuilles préparées par extraction de la moelle des tiges, découpage, mouillage, pressage, séchage, battage et encollage final ! Le scribe impassible assis en tailleur son calame à la main ! L’écriture abandonne l’outil à graver pour l’encre et le pinceau-roseau. Élégance et fluidité !
Déjà courant au IIIe millénaire avant J.-C., le papyrus est utilisé durant toute l’Antiquité égyptienne. Il se répand ensuite dans le monde grec et romain, où il décline avant de disparaître au Xe siècle.
Le parchemin, de Pergame ou d’ailleurs
De l’Égypte à la Perse, le cuir et les peaux d’animaux servaient depuis longtemps à l’écriture. Toutefois, il faudra attendre le IIIe siècle avant J.-C. pour qu’un traitement adapté transforme les peaux de mouton, de chèvre ou de veau en un excellent support, à la fois souple et solide : le parchemin. Avec lui, plusieurs améliorations surgissent : ses deux faces sont utilisables ; il peut être gommé (gratté) ; il se conserve bien dans le temps ; et enfin, sa matière première est disponible un peu partout. Fort de ces atouts, le parchemin s’imposera progressivement face au papyrus, et le supplantera définitivement après le IVe siècle.
Selon une légende, la ville de Pergame, en Asie mineure, serait à l’origine de l’invention du parchemin (pergamineum en latin).
En Chine, après la soie sa majesté le papier !
En Chine, l’écriture remonte également au IIIe millénaire avant J.-C. Pendant longtemps, les signes sont gravés dans toutes sortes de matériaux : os, carapaces de tortues puis plaques de bois. À partir du IIe siècle avant J.-C., la soie apparaît comme support. Il est facile d’écrire sur ce tissu souple avec un pinceau ou un bambou enduits d’encre.
Toutefois, matériau de choix, la soie coûte cher ! D’où l’idée d’employer des chutes et des chiffons de soie, détrempés et réduits en bouillie, puis séchés et laminés… Encore une étape, et la soie, décidément hors de prix même en lambeaux, est remplacée par des écorces, des morceaux de coton et autres déchets… Vous aurez reconnu le papier, autre innovation majeure dans la longue évolution du livre.
Si sa technique de fabrication est découverte en Chine au début de notre ère, il faudra toutefois attendre sept siècles avant que le secret soit révélé au monde arabe ; et encore quelques autres pour qu’il parvienne en Europe aux alentours de 1100.
Du livre-rouleau au codex romain
Qu’ils soient en papyrus, en soie ou en parchemin, les livres de l’Antiquité se présentent en général sous la forme de rouleaux de 6 à 10 mètres de long – parfois plus. Leur lecture nécessite de les dérouler colonne après colonne dans le sens horizontal, en maintenant avec les mains les parties enroulées à gauche et à droite. Imaginez ! Retrouver un passage du début alors que vous en êtes à la fin… Plutôt compliqué !
Sous l’Empire romain, du Ier au IVe siècle, le livre-rouleau (appelé volumen en latin) est peu à peu remplacé par le codex : des feuilles pliées rassemblées dans des cahiers cousus les uns aux autres. Fini le volumen encombrant et si peu pratique à consulter. Bienvenue au codex qui ouvre la voie au livre moderne !
D’autres innovations suivront, qui aboutiront au livre imprimé sur papier qui nous est familier… mais ceci est une autre histoire !