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Un 14 juillet peut en cacher un autre !

Costumes du commencement de la Révolution en 1790. Gravure coloriée datant de 1882.
Le 14 Juillet est devenu la fête Nationale française par une loi votée en mai 1880. Quel anniversaire fête-t-on ce jour-là ? La prise de la Bastille le 14 juillet 1789 et la fin de la monarchie absolue, certes. Mais pas seulement… Le 14 Juillet, c’est aussi l’anniversaire de la fête de la Fédération organisée en 1790, première commémoration de la prise de la Bastille, qui se déroula dans un climat d’union nationale.

Rien ne vaut une plongée dans un de ces bons vieux livres anciens que nous aimons tant pour se rafraîchir la mémoire ! En l’occurrence : Paris à travers les siècles, Histoire nationale de Paris et des parisiens, par Henri Gourdon de Genouillac, publié en 1882. Nous y trouvons notamment le témoignage direct d’un membre de l’Assemblée nationale de l’époque, que nous résumons ici.

Avertissement préalable !

Attention, le mélange peut paraître détonnant pour un citoyen de 2016 non averti ! En 1790, Louis XVI et sa famille sont encore bien vivants. Nous sommes en pleine transition entre la monarchie absolue, abandonnée l’année précédente, et la République qui s’affirmera en 1792.

14 juillet 1790 : Chantons sous la pluie !

Le 14 juillet 1790, à Paris, les membres de l’Assemblée nationale se regroupent à neuf heures et attendent pendant une heure et demie avant que le commandant général de la garde parisienne, M. de la Fayette, leur indique le moment du départ.

Ce jour-là, il tombe des « torrents d’eau », selon l’expression de notre chroniqueur. À peine ont-ils fait un pas dehors que les représentants de la nation sont déjà inondés. « Nous avons pris le parti de rire de notre désastre. Le long de notre route nous avons trouvé partout les mêmes dispositions dans les doubles et triples rangs de spectateurs qui s’étaient placés sur le passage ; ils étaient trempés et ils chantaient. »

Une cérémonie grandiose organisée sur le Champ de Mars

Les membres de l’Assemblée nationale poursuivent leur route. « Un pont très sûr et très large avait été jeté vis-à-vis du Champ de Mars, sur des bateaux. En marchant sur ce pont, nous avions devant les yeux un arc de triomphe. Ses bas-reliefs, ses inscriptions parlaient, non de guerre et de victoire sanglante, mais de liberté, de constitution, des droits de l’homme.

Lorsque nous avons eu passé ces portes triomphales, nous avons cru entrer dans un autre monde. Un espace immense, terminé de deux côtés par un pourtour de terres transportées, sur lesquelles on avait placé 12 ou 14 rangs de banquettes. Vis-à-vis de l’arc de triomphe, s’élevait une galerie couverte où paraissait le trône du roi des Français, Louis XVI. À la droite et à la gauche du trône, des gradins servaient de sièges aux représentants de la nation et aux membres de la municipalité, aux électeurs de Paris, aux députés extraordinaires de tout le royaume. Au milieu de l’immense enceinte du Champ de Mars se trouvait l’autel de la patrie. »

La Fayette, la vedette du jour !

« Il fallut attendre près de 3 heures avant que tous les fédérés soient arrivés. Les ondées revenaient toujours ; au milieu d’une averse, quelques-uns des fédérés se sont mis à danser en rond, puis les danses se sont multipliées. L’air retentissait de chants et de cris de joie. Lorsque toutes les bannières ont été rassemblées, elles ont été portées autour de l’autel pour y être bénies au nom de l’Être suprême. M. de la Fayette, à qui la sûreté de cette grande journée avait été confiée, a paru. »

Finalement, la cérémonie débute à trois heures et demie. Pas moins de 400 000 spectateurs couvrent les gradins du Champ de Mars.

« La reine portait des plumes tricolores. »

Des salves d’artillerie annoncent l’arrivée du roi, en habit, et de la reine qui porte des plumes tricolores. Ils sont acclamés. Une messe solennelle est célébrée à l’autel de la patrie par l’évêque d’Autun, entouré de deux cents prêtres avec des ceintures tricolores.

Puis La Fayette monte sur l’autel et prononce ce serment :

– Nous jurons d’être à jamais fidèles à la nation, à la loi et au roi, de maintenir de tout notre pouvoir la constitution décrétée par l’Assemblée nationale et acceptée par le roi, de protéger les personnes et les propriétés, et de demeurer unis à tous les Français par les liens indissolubles de la fraternité.

La Fayette est traité en héros. Des fédérés se jettent à ses genoux, embrassant ses mains et ses bottes. Et lorsqu’il boit d’un trait un verre de vin qu’un inconnu lui présente, sans s’inquiéter de savoir s’il ne contenait pas quelques substance nuisible, c’est du délire !

On danse à la Bastille !

Paris, ce soir-là, s’amuse et jubile. Un grand banquet de 22 000 couverts réunit les fédérés dans les jardins de la Muette ! Sur le terrain de la Bastille, où la vieille forteresse est désormais en ruines, les parisiens dansent. Ils danseront là pendant trois jours !

De fait, à Paris, la semaine qui suit le 14 juillet 1790 est entièrement consacrée aux plaisirs et aux divertissements ! Nous sommes alors en 1790 et, nous le savons aujourd’hui, l’union nationale ne durera pas…

Retrouvez l’intégralité de ce texte, et bien d’autres événements historiques de cette époque, dans le tome quatrième de Paris à travers les siècles* de Gourdon de Genouillac (1826-1898), paru en 1882. Nous vous garantissons une étonnante plongée dans le temps !

* Toutes les illustrations de l’article proviennent de ce livre.

Cet article vous a intéressé ? Vous aimeriez en savoir plus sur les livres d’histoire ? Ou vous préférez découvrir d’autres aspects des livres anciens et modernes ? N’hésitez pas à nous écrire en nous laissant un commentaire en bas de la page. Nous serons ravis de vous lire et de répondre à vos questions et vos attentes.

14 juillet 1790 : l'autel de la Patrie installé au cœur du Champ de Mars.

L'autel de la Patrie au milieu de l'immense enceinte du Champ de Mars. Gravure, 1882.
L'autel de la Patrie au milieu de l'immense enceinte du Champ de Mars. Gravure, 1882.

Marchands parisiens

Des marchands parisiens au 18e siècle. Gravure coloriée, 1882.
Des marchands parisiens au 18e siècle. Gravure coloriée, 1882.

« ICI L'ON DANSE ! »

Le 14 juillet 1790, les Parisiens dansent sur l'emplacement des ruines de la Bastille. Gravure, 1882.
Le 14 juillet 1790, les Parisiens dansent sur l'emplacement des ruines de la Bastille. Gravure, 1882.

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